Zhao Bao : un style, un village

taijiquan style Zhaobao

Maître Wang expliquant à Philippe Grangé la posture « Le tigre en embuscade »

Philippe Grangé est élève direct de Wang Chang’An, Maître de la 12ème génération de taiji quan de style Zhaobao. Il nous présente un style ancien de taijiquan sorti de l’ombre en Chine ces dernières années, et qui gagne de plus en plus les faveurs du public : le taijiquan de Zhaobao ( 趙保太極拳 )

Si en général, les styles de taijiquan sont désignés par le nom du fondateur, celui-ci tient le sien de son lieu d’origine, le bourg de Zhaobao, situé dans le comté de Wen, province du Henan au cœur de la Chine du Nord. Cette région, traversée par le célèbre Huang He (fleuve jaune), est le berceau de la civilisation pluri-millénaire chinoise et un haut lieu des arts martiaux.

Ce taijiquan est un authentique gong fu d’origine taoïste mais de formation populaire. Pratiqué au début par des moines taoïstes itinérants, il a été transmis au 16ème siècle à un jeune homme du bourg de Zhaobao, passionné d’arts martiaux, du nom de Jiang Fa ( 蔣发, 1574 – 1654). Puis, au fil des siècles, les générations successives de maîtres du bourg de Zhaobao l’ont adapté à leurs besoins et amené à maturation.
La transmission de ce taijiquan s’est faite de personne à personne* et non au sein d’un clan ou d’une famille comme le style Chen ou Yang par exemple. C’est pourquoi il existe de nombreuses déclinaisons de ce style (style He, style Li, style Hulei, style Hou, style Zheng da jia, style Zheng xiao jia, style Kai
He, etc). On m’a raconté qu’à Zhaobao, il arrive parfois qu’un homme pratique un style et sa femme un autre !

Autrefois, la règle exprimée par le dicton ( 趙保太極拳不出村 ) Zhaobao taijiquan bu chu cun, littéralement : « Le taijiquan de Zhaobao ne sort pas du village », était de ne transmettre ce taijiquan qu’à l’intérieur du village. La survivance tardive de cette règle traditionnelle a freiné l’expansion du taijiquan de Zhaobao.
Encore de nos jours, alors qu’à Shaolin et à Chenjiagou, les pancartes de wuguan ( 武館 lieu où l’on pratique les arts martiaux) sont légion, dans les rues de Zhaobao, qui compte pourtant 10 000 habitants, aucun signe n’indique que ce bourg est imprégné de taijiquan depuis le 17ème siècle. Comme autrefois quand le secret était une question de survie, le taijiquan se pratique discrètement derrière les murs, dans les arrière-cours. Cette coutume a donné lieu comme je l’ai mentionné précédemment, à la création de nombreuses formes de Zhaobao taijiquan.

On dit que fondamentalement, le taiji quan de Zhaobao a peu changé depuis les origines. C’est la raison pour laquelle ce style accorde la même importance aux deux domaines que sont la santé et les applications martiales. Voici quelques-unes de ses spécificités :

Les 3 cadres de pratique
Ce taiji quan a conservé différentes méthodes de pratique suivant les capacités de l’adepte, ou de l’objectif recherché.
Par exemple, l’adepte peut s’exercer suivant le cadre bas, moyen ou haut, qui chacun, développe des capacités spécifiques. Tel cadre est plus adapté à l’apprentissage des principes du corps ; tel autre, au renforcement physique ; tel autre affine la circulation de l’énergie vitale (nei gong) ; tel autre encore aux applications martiales.

Les 24 principes du corps
Une autre des particularités de ce style est sa théorie qui comprend 24 principes : 8 pour les bras, 8 pour le corps, 8 pour les jambes. Ces principes peuvent varier suivant les styles.

Taiji quan style Zhaobao maitre Wang et Philippe Grangé

Maître Wang exécutant une application martiale sur Philippe Grangé

Les applications martiales
Ce style a gardé des temps anciens, de nombreuses techniques : de jambes, de chin na, de projections, d’attaques des points vitaux ou sensibles.
Applications par Wang Chang’An

Un système de nei gong
Ce système est basé sur des gestes simples et répétitifs qui favorisent la circulation de  l’énergie vitale, le qi.

Un dicton de Zhaobao dit : «L’adepte du taijiquan de Zhaobao est glissant comme un poisson, souple comme du coton, gluant comme de la colle, dur comme le métal».
De nos jours, c’est le sixième grand style de taijiquan reconnu par les institutions chinoises. A l’instar des styles célèbres, que sont les styles Chen, Yang, Wu, Hao et Sun, il participe activement suivant la tradition, à la culture du corps et de l’esprit.

 

*Généalogie du taijiquan de Zhaobao :
Zhang Sanfeng : Création de l’art interne de Wudang – Taoïstes itinérants – Wang Lingzeng – Jiang Fa (1574 –   ) : Fondateur du taijiquan style Zhaobao 1ère génération – Xing Xihuai 2ème génération – Zhang Chuchen 3 ème génération – Chen JinBai et Wang Baiquing 4ème génération – Zhang Zongyou 5ème génération – Zhang Yan 6ème génération (fils de Zhang Zongyou) – Chen Qingping 7ème génération – He Zhaoyun 8ème génération – He Qingxi 9ème génération (petit-fils de He Zhaoyuan) – Zheng Boying 10ème génération – Guo Shikui (Yin Tingwu père de Wang Changan, Duan Guoshi, Fan Shishu : les 4 ont été les maîtres de Wang Changan, le principal étant Guo Shikui) 11ème génération – Wang Changan 12ème génération (son premier nom était Yin Tiancai).

taiji quan à Zhaobao

Une interview sur la sixième venue de Philippe Grangé en Chine pour étudier le taijiquan de Zhaobao dans le journal de la ville de Dongguan province du Guandong